Après la région de l'Amdo, voici la 3ème et dernière partie de notre voyage en Chine, le Tibet. Nous avons tellement souhaité réaliser ce rêve que nous n'avons qu'une idée en tête prendre le train et arriver à Lhassa.
Voyage organisé en Chine de 3 semaines (Novembre 2015) raconté par icare
En début d'après-midi, départ pour rejoindre la gare de Xining. Après avoir traversé l'immense parking, nous devons prendre la file d'attente pour les vérifications d'identité et de permis de séjour au Tibet. La foule de voyageurs est impressionnante, heureusement nous arrivons à trouver une place assise dans la salle d'attente.
Vers 16 heures, et après un énième contrôle, nous embarquons à bord du train, "le dragon de fer qui danse sur le Toit du monde".
Le tronçon Xining Lhassa comprend 960km de voie ferrée à plus de 4 000m d’altitude. Tanggula, à 5072m, est la plus haute gare du monde (le record précédant était de 4 829 m détenu par le train de la Sierra, à la gare de Ticlio, au Pérou), et le tunnel de Fenghuoshan, à 4 905m, le tunnel le plus haut du monde.
Plus de 80% de la voie est construite sur du pergélisol (permafrost), c’est à dire sur des terres gelées la plupart du temps et pour lesquelles il a fallu tenir compte, lors de la construction de la voie, des dégels partiels.
La voie ferrée qui relie Pékin à Lhassa sur 4 064km a été inaugurée le 1er juillet 2006 par Ju Jintao, administrateur du Tibet de 1988 à 1992 et président de la République Populaire de Chine du 15 mars 2003 au 14 mars 2013. Une extension de la ligne de Lhassa à Shigatsé, la deuxième plus grande ville de la Région Autonome du Tibet est entrée officiellement en service le 15 août 2014.
Nous nous installons dans notre compartiment en 1ère classe ("couchettes molles"), prévu pour 4 personnes, c'est un peu exigu avec les bagages. Une grosse couette nous attend pour la nuit et un système de distribution d’oxygène est installé à proximité de chaque couchette en cas de problème respiratoire. Tout le long du couloir des strapontins sont installés près des fenêtres, nous pouvons ainsi profiter du paysage. Le voyage va durer 21 heures pour effectuer 1 972 km.
Le train est pressurisé, isolé de l’extérieur, avec un système d’air conditionné puissant qui ventile un air enrichi en oxygène dans les couloirs. Impossible d’ouvrir la fenêtre pour prendre une photo lorsqu’il roule à 5 000m d’altitude!
Dans la nuit, je suis réveillée par un état un peu nauséeux; de ma couchette je regarde par la fenêtre, le spectacle est époustouflant: le ciel, éclairé par la lune, est totalement dégagé et constellé d'étoiles (pas mon appareil sous la main et je ne veux réveiller personne). Je me lève sans bruit et je vais dans le couloir, tout est calme. Un tableau indique la température, l'altitude et la vitesse du train. Le lendemain matin, le ciel est un peu nuageux mais nous pouvons profiter de la vue sur les sommets enneigés.
Nous arrivons à Lhassa sous un soleil éclatant; j'ai quitté la Chine pour entrer dans le monde tibétain...
En sortant de la gare, la découverte de Lhassa me déconcerte, c'est un choc de découvrir que la capitale du Tibet est en majorité une ville chinoise (60% des habitants sont des Chinois de l'ethnie Han). D'ailleurs Lhassa vit à l'heure de Pékin, histoire de bien montrer qu'on est en Chine. Ce n'est qu'en pénétrant dans le quartier du Barkhor qu'on découvre l'âme tibétaine et la ferveur des pèlerins.
Restée longtemps interdite aux étrangers, Lhassa attire comme un aimant, le père Régis Évariste Huc et le père P. Joseph Gabet parviennent à Lhassa, le 20 janvier 1846, après 18 mois de voyage. Ils sont les premiers étrangers à se rendre à Lhassa depuis Thomas Manning en 1811-1812, et précèdent de 85 ans le passage de la première femme occidentale, Alexandra David-Néel.
Nous commençons notre journée par la visite du Potala, il ne faut pas arriver en retard car le billet n'est pas échangeable. Après les contrôles d'identités (ne pas oublier le passeport), la fouille des personnes et des sacs (les bouteilles emplies de liquides sont interdites), nous pouvons enfin pénétrer dans le palais-forteresse (dzong).
La première construction remonte au VIIe siècle, sous le règne du roi Songtsen Gampo, il fut ensuite reconstruit au XVIIe siècle par le 5e dalaï-lama, Lobsang Gyatso (1617-1682). Il devint le palais d'hiver des dalaï-lamas successifs (après la construction, au XVIIIe siècle, par le 7e dalaï-lama, Kelzang Gyatso, du Norbulingka, le palais d'été), jusqu'à la fuite en Inde du 14e dalaï-lama, Tenzin Gyatso, après le soulèvement contre l'armée chinoise, en 1959. Aujourd'hui, le palais est devenu un musée. Il est strictement interdit de faire des photos à l'intérieur, caméras de surveillance et gardiens sont là pour nous le rappeler.
Le Palais du Potala bénéficie d'une protection forte en tant que patrimoine national d'Etat Chinois depuis 1961, à l'initiative de Zhou Enlai. Grâce à cette protection, il a échappé au vandalisme lors de la révolution culturelle où plus de 6 000 monastères, lieux de culte et ermitages furent détruits. Malgré tout, plus de 7 000 volumes (certains pesant plus de 40kg) ont été emporté sur ordre des autorités chinoises.
Il est inscrit au Patrimoine Mondial de l'UNESCO depuis 1994.
L'histoire du monastère de Ganden est une illustration frappante des récents tourments du Tibet. C'est le premier monastère de l'école des guélugpa (appelés Secte des "Bonnets Jaunes") construit en 1409 par le fondateur même de la secte, Djé Tsongkhapa, qui en fut le premier abbé. Située à 35 km de Lhassa, cette université monastique a toujours été réputée pour son enseignement.
En 1966, les canons des gardes rouges encerclent Ganden et ses 2 000 moines. Pendant que les tanks bloquent l'unique route, canons et avions pilonnent le monastère pendant plusieurs jours. Les moines qui tentent de s'échapper sont mitraillés Des centaines de bâtiments de l'ancien monastère, il ne reste que quelques pans de murs avant que la reconstruction ne débute en 1986 à l'initiative des habitants, malgré les réticences des Chinois.
En mai 1996, nouveau drame: les Chinois poursuivant une campagne de nationalisation, entrent dans Ganden pour y faire retirer de force toutes les photos du dalaï-lama. Deux d'entre eux résistent et sont froidement abattus sur place. D'autres blessés tentent de s'enfuir, certains y parviennent, mais la plupart sont jetés en prison. Ceux autorisés à rester au monastère doivent se soumettre à des cours intensifs de "rééducation patriotique".
Contrairement aux autres monastères, le titre d'abbé de Ganden n'est pas issu de la réincarnation, mais l'Elu est choisi parmi les moines les plus éveillés des Gelugpa tous monastères confondus et sans ségrégation de classes. Il porte le titre de Tri Rinpoché ou Tripa. Personnages très influents, ces abbés furent parfois choisis comme régents jusqu'à la majorité du dalaï-lama. Son mandat dure 7 ans, le dernier en date a du fuir la répression pour rejoindre le Dalaï-lama en Inde. Aujourd'hui il reste à peine 300 moines et novices à Ganden (3 000 à son apogée).
A l'intérieur les photos ne sont pas autorisées et certaines salles étaient fermées.
C'est tôt, le matin, qu'il faut suivre les pèlerins qui se rendent au temple, le spectacle est envoûtant.
Trois cercles concentriques de prières font le tour du temple du Jokhang. L'un d'entre eux passe par le quartier du Barkhor où de nombreux pèlerins marchent pendant des journées entières en faisant tourner leurs moulins à prières.
Le monastère du Jokhang, temple le plus ancien du Tibet, est aussi l'édifice le plus sacré du pays. Édifié en 639, il abrite la statue du Bouddha (le Jowo), apportée par la princesse chinoise Wensheng (de la dynastie Tang et bouddhiste), l'une des deux épouses du roi Songtsen Gampo. Pouvoir contempler cette statue une fois dans sa vie est le souhait le plus cher de tout tibétain.
En 1959, lors de la révolte de Lhassa, les chars chinois détruisirent la façade du Jokhang, qui fut transformé en porcherie durant la Révolution culturelle. Il a été reconstruit depuis. En 2000 il a été inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO dans l' "ensemble historique du palais du Potala".
C'est là que le jeune dalaï-lama, alors âgé de 15 ans, et se préparant à ses examens, apprit l'invasion chinoise. C'est là aussi que le panchen-lama (2ème autorité après le dalaï-lama), revenant de 18 ans d'exil (et de lavage de cerveau) refusa par respect de s'asseoir sur le trône du dalaï-lama, lors d'une cérémonie du Nouvel An en 1987.
Le temple du Jokhang est un vaste complexe de chapelles, de cours et de bâtiments d'habitations et de services. Après avoir traversé un corridor étroit, on accède à une grande cour à ciel ouvert, au milieu se trouve le trône du Dalaï-lama, deux ouvertures latérales donnent accès à un corridor composé de centaines de moulins à prières pour y accomplir le parikrama, la circumambulation du Nangkhor. De part et d'autre de l'entrée du temple principal, des peintures décrivent le voyage de la princesse Wencheng jusqu'à Lhassa et son mariage avec le roi.
Au centre de la salle centrale s'élèvent quatre grandes statues; la salle est entourée de chapelles dédiées à différentes divinités (Tsongkhapa, Avalokiteshvara, Maitreya, Amitabha, Sakyamuni, Amitayus le bouddha de la longévité, aux bouddhas de médecine, aux trois rois Trisong Detsen, Songtsen Gampo et Ralpachen). La chapelle principale du fond dédiée à Sakyamuni abrite le Jowo, une statue du Bouddha dans sa forme de gloire.
Bien sur les photos sont interdites à l'intérieur, mais nous avons eu la permission d'en faire quelques-unes de tibétains en costume.
Situé à 5 km de Lhassa, au nord du temple du Jokhang, Sera est l'un des trois grands monastères de l'école Gelugpa (secte des Bonnets Jaunes) avec les monastères de Ganden et Drepung. Leur importance les fit appeler "les trois piliers du Tibet".
Le monastère a été fondé en 1419, par Jamchen Chojey, un disciple de Die Tsongkhapa (le fondateur de la branche Gelugpa du bouddhisme tibétain).
Comme les monastères de Drépung et Ganden, il comprend trois collèges:
- le Sera Mey Dratsang, construit en 1419 où est donnée l'instruction fondamentale aux moines,
- le Sera Je Dratsang, construit en 1435 qui est le plus grand des trois et réservé aux moines en voyage, notamment des moines mongols,
- le Ngagpa Dratsang, construit en 1559, qui est une école pour l'enseignement des tantras Gelugpa.
A son apogée il abritait plus de 5 000 moines et novices. Très endommagé, en 1947 lors de la répression gouvernementale tibétaine contre les partisans de Réting Rinpoché, en 1959 après l’intervention militaire chinoise au Tibet (ses collèges ont été partiellement détruits et des centaines de moines tués), puis sous la Révolution culturelle (1966-1977), le monastère a été restauré; il abritait environ 550 moines début 2008. Après les troubles au Tibet, en juin 2008, il n’en restait plus qu’une poignée. Actuellement, une centaine de moines occupe les lieux.
Un monastère du même nom a été refondé en exil, à Bylakuppe, près de Mysore (État du Karnataka) en Inde. Aucun des moines de l'université tantrique de Ngagpa Dratsang n'ayant survécu à l'invasion, seuls les collèges de Sera Mey et Sera Jey ont été refondé.
Avec ses allures de village, Sera constitue une visite très intéressante, en particulier les débats des moines dans le jardin du monastère auquel nous avons pu assister.
Seules les photos à l'extérieur, sont autorisées.
Ce matin, sous un soleil éclatant, départ par la vallée du Yarlung pour rejoindre Tsedeng.
La vallée du Yarlung, dans le Tibet Central, n'est autre que le nom tibétain du Brahmapoutre qui enserre le Namcha Parwa (7 756 m) et sort du pays pour aller se jeter dans le Gange. Elle n'abrite pas moins le premier village tibétain (en contrebas de Yumbulakang ou Yumbulalang), le palais où vécut le premier roi du Tibet ainsi que le premier monastère tibétain (Samye) que nous visiterons en cours de route. C'est aussi le berceau de la dynastie Yarlung des rois du Tibet.
Le fleuve parcourt trois pays différents et porte ainsi un nom différent suivant la partie de son cours, le Yarlung Tsangpo au Tibet, le Brahmapoutre dans sa partie indienne et enfin Jamuna dans sa partie bengalie. Il est navigable sur ses 1 290 derniers kilomètres.
Sur la route qui nous conduit au monastère de Samye, nous longeons la rive nord du Yarlung Tsangpo, dans la vallée du Yarlung.
Oasis au milieu des dunes, le monastère fut construit entre 775 et 779 par le roi yarlung Trisong Detsen avec l’aide de Santaraksita, un moine indien, et du maître indien Padmasambhava (Guru Rimpoché). C'est le plus ancien grand ensemble monastique du Tibet, de l'école des Anciens (Nyingpama, appelé aussi "Bonnets Rouges").
C'est ici qu'a eu lieu vers 790 le "Débat de Samye", débat qui devait déterminer si le bouddhisme tibétain naissant devait suivre la voie indienne basée sur l'étude ou la voie chinoise chan (Zen) orientée vers la contemplation: ce fut la voie indienne qui l'emporta.
Le monastère est conçu selon le plan d'un mandala. Dans les quatre directions, quatre temples évoquent les quatre continents, flanqués chacun de deux sous-continents: Aryapalo au sud (premier de tous les temples construits à Samye), Jampa à l'ouest (dédié à Maitreya, Jampel à l'est (dédié à Manjushri) et Jangchub Semkye au nord (utilisé comme entrepôt).
Aux quatre coins du temple central (Utse) se dressent quatre chörtens de couleurs différentes (noir, rouge, blanc et vert) qui représentent les 4 points cardinaux.
Samye fut un centre politique majeur aux VIIIe, IXe et Xe siècles. Pendant la Révolution culturelle, il aurait, paraît-il, moins souffert que les autres monastères du Tibet central, mais en 1966 certains bâtiments ont été détruits par les Gardes rouges, des fresques criblées d'impacts de balles, tandis que poutres, visseries laissées à l'abandon furent récupérées par les habitants pour retaper leurs propres maisons. Heureusement, un vieil homme de la région avait encore d'anciennes photos de la charpente, et c'est ainsi que le toit a pu être reconstruit. Le monastère a été restauré en 1988-1989 et abrite actuellement une centaine de moines.
Le 10 février 2009, 9 moines suivant des études au monastère de Samye ont été condamnés à des peines de 2 à 15 ans de prison pour avoir participé aux brèves manifestations du 15 mars 2008 qui s'étaient tenues devant le siège principal administratif du gouvernement de Samyé. Le 19 mars 2008, un moine qui venait du monastère de Dorje Drak, Namdrol Khakyab, s'est suicidé laissant un message où il parlait de la répression du régime chinois, clamant l'innocence des autres moines du monastère et prenant l'entière responsabilité de la manifestation.
Photos autorisées à l'intérieur du monastère.
Perché sur une colline, le palais de Yumbulagang (ou Yumbu Lhakhang ou encore Yungbulakang) serait la plus ancienne forteresse (dzong) du Tibet. Selon une légende de la religion bön, ce fut le premier bâtiment construit au Tibet sous le règne du premier roi mythique Nyatri Tsenpo, au IIe siècle av. J.-C., roi qui serait venu d'Inde chargé de textes bouddhiques en sanskrit.
Cinq générations plus tard, le 33e roi du Tibet, Songtsen Gampo (né vers 609-613 - mort en 650), unifia le Tibet et fonda Lhassa où il installa sa résidence principale et son administration, et fit construire le premier bâtiment du Palais du Potala.
Dix siècles après, sous le règne du Ve Dalaï-Lama (Lozang Gyatso (1617-1682), Yumbulagang devint un monastère de l'école Gelugpa du Bouddhisme tibétain. Totalement détruit au cours de la Révolution culturelle, l'ensemble fut reconstruit en 1982, d'après d'anciens plans. Les bâtiments furent consacrés par le Xe Panchen Lama ( 19 février 1938 - 28 janvier 1989) en 1984.
A l'intérieur, on peut voir des fresques retraçant l’histoire du premier roi tibétain ainsi que des statues du Bouddha Thiesung Sangjie, du premier Roi de Tibet Nyatri Tsenpo, du roi Songsten Gampo et d'autres personnages historiques (photos interdites).
Actuellement, cinq moines y résident encore.
Ce matin soleil et ciel bleu sont au rendez-vous pour cette journée inoubliable. En effet, nous allons franchir 2 cols, le Kamba-La à 4 797m pour rejoindre le lac sacré Yamdrok-Tso (ou Yok-Yumtso) situé à 4 488m, et le Karo-La à 5 013m qui offre une vue splendide sur des glaciers à plus de 7 000m.
Le Yamdrok-Tso, le "lac turquoise", est un des trois plus grands lacs sacrés du Tibet. Les Tibétains l'ont préservé en tant que tel, pas d'habitations, pas de bateaux, pas de pêche, il est d'ailleurs interdit de manger les poissons qui sont aussi sacrés.
L'endroit est magnifique, et une fois encore nous entrons dans un autre monde. Mais hélas la construction d'une centrale électrique sur le Yamdrok-Tso a débuté en 1989, l'année de la mort du 10e panchen-lama, Choekyi Gyaltsen, fortement opposé à ce projet qui entraînait notamment la disparition du village tibétain de Dramalung et des champs avoisinants. Elle est entrée en activité en 1997 et a été inaugurée en présence de Gyancain Norbu, reconnu par la République Populaire de Chine comme le successeur du 10e panchen-lama. Elle est située aux abords des berges du Yarlung Tsangpo (Brahmapoutre), 850 m en contrebas du lac, dont l'eau n'est pas renouvelée et qui pourrait, de ce fait, finir par s'assécher.
Pourtant d’après une ancienne prédiction, si le lac Yamdrok-Tso venait à être asséché, le Tibet, ayant perdu son symbole vital, cesserait d'être habitable.
L'après-midi, ce sont encore des paysages époustouflants qui nous attendent pour rejoindre la ville de Gyantse en passant par le col du Karo-La (5 013m) qui offre une vue splendide sur les glaciers à plus de 7 000m. Le glacier Karola fait partie de la chaîne de l'Himalaya, mais reste encore loin du Mont Everest que nous aurons la chance de voir dans quelques jours. Devant un tel paysage on se sent vraiment tout petit.
Dominée par un dzong (forteresse), Gyantsé (3 977m) est pour moi la plus jolie petite cité que j'ai pu visiter durant mon séjour au Tibet. Située dans la vallée fertile du Nyang Chu, elle a conservé un quartier tibétain traditionnel à l’écart de la ville moderne chinoise.
Troisième ville du Tibet (après Lhassa et Shigatsé), elle fut prospère grâce à sa position stratégique, au croisement des routes caravanières reliant Lhassa au Sikkim et au Népal (la ville et le monastère percevaient une redevance sur les marchandises).
Le monastère de Pelkhor Chöde (ou palkhor Chöde ou Palcho), situé à 4 040m d'altitude, a été construit entre 1418 et 1425 par Rabten Kunsang Phagpa (un prince de Gyantsé), sous l'autorité de Kedrub Je, un des disciples de Tsongkhapa (fondateur de la branche gelugpa du bouddhisme tibétain).
À l’intérieur du mur d’enceinte, cohabitaient autrefois 16 collèges appartenant à trois écoles différentes: gelugpa, sakyapa et bütonpa (ou Zhalupa, une petite secte basée à Shalu); aujourd'hui, il ne reste plus qu'un seul collège.
Les halls et chapelles du temple principal (Tsuklakhang) ont traversé les siècles, dont la Révolution culturelle, sans dommages majeurs, semble t-il. Les intérieurs sont ornés de fresques et sculptures remarquables. Au fond de la salle d'assemblée, se trouve la chapelle la plus importante du temple (imposante trilogie des bouddha du Passé, Présent et Futur, entourée par 8 bodhisattva de 4 m de haut).
Dans la cour, le monastère possède le plus haut chörten, le Kumbum (édifié en 1427), et le plus connu du Tibet (chapelles en cours de restauration).
Photos autorisées à l'intérieur du monastère mais payantes.
Deuxième ville du Tibet et ancienne capitale du Tsang (Tibet historique), Shigatsé compte environ 80 000 habitants, dont une majorité de Chinois. Elle possède un important patrimoine culturel et religieux.
Le monastère de Tashilhumpo, dont le nom tibétain signifie "toute la fortune et le bonheur rassemblés ici" ou "monceau de gloire", est situé sur une colline au centre de la ville. Il a été fondé en 1447 par le premier dalaï-lama Genden Drup ((1391-1475), disciple de Tsongkhapa, fondateur de l'école Gelugpa (Bonnets Jaunes). À son apogée, Tashilhumpo abritait près de 5000 moines contre environ 600 actuellement.
Tashilhumpo est le siège traditionnel des panchen-lamas ("grand érudit") successifs, deuxième autorité spirituelle du bouddhisme tibétain après le dalaï-lama ("océan de sagesse").
En 1642, le Vème dalaï-lama accorda à son précepteur et abbé du monastère, Lobsang Chogyi Gyaltsen, le titre de quatrième réincarnation du panchen-Lama. Ainsi, du IVème au Xème, les panchen-lamas vécurent ici et tous y demeurent enterrés.
Longtemps, les pouvoirs politiques et richesses des panchen-lamas ont crû. Ces derniers possédaient d'immenses domaines sur lesquels vivaient des milliers de nomades. Fatalement, ces richesses ont fini par entrer en concurrence avec celles des dalaï-lamas. Les Chinois ont habilement tiré parti de ces joutes tibétaines.
Le 28 janvier 1989, le XXème Panchen Lama, Lobsang Choekyi Gyaltsen, mourut ici, six jours après un discours anti-chinois. Son décès servit de catalyseur à de puissantes rebellions.
En 1995, le XIème panchen-lama, Gendhun Choekyi Nyima (né le 25 avril 1989), est reconnu par le dalaï-lama (voir photo N°29 de l'albumTibet-21: Vallée du Yarlung). Il est aussitôt placé en résidence surveillée avec sa famille par le régime chinois, ce qui en fait le plus jeune prisonnier politique au monde. Gyancain Norbu (né le 13 février 1990), a été désigné le 29 novembre 1995 par le gouvernement chinois comme le XIe panchen-lama du Tibet. Les Tibétains en exil et ceux de l'intérieur ne l'ont jamais accepté, et ce jeune homme, qui n'est en rien responsable dans cette histoire, ne loge pas au monastère mais dans un nouveau palais inaccessible au public .
Pas de photos des intérieurs car la moindre photo est payante et atteint des sommets astronomiques.
Aujourd'hui départ sur la spectaculaire Route de l’Amitié (Friendship Highway), entre Shigatse et Baber, qui permet d’admirer des sommets parmi les plus hauts du monde (+ de 8 000m d'altitude).
La route qui relie Lhassa-Katmandu est mythique; longue de 948 km, elle offre un superbe aperçu du pays des neiges. Le contraste entre ces reliefs grandioses, ces routes difficiles et la tranquillité des villages est saisissant.
Initialement, notre circuit devait nous conduire jusqu'à Khatmandu, malheureusement les séismes d'avril 2014 ne nous ont pas permis de franchir la frontière entre la Chine et le Népal; néanmoins cette journée reste inoubliable pour nous.
Nous arrivons au terme de notre circuit et la visite du monastère de Sakya va clôturer ce merveilleux voyage. Situé à 4 300 m d'altitude, ce monastère, siège de l'école Sakyapa du bouddhisme tibétain, a été fondé en 1073 par Könchog Gyelpo (1034-1102), premier Sakya Trizin et membre de la noble et puissante famille Khön.
Il prit son essor au XIe siècle, grâce à l’impulsion de cinq maîtres successifs appelés les "Cinq Patriarches Sakya". Le quatrième, Sakya Pandita (1182-1251), fut le plus célèbre des cinq, son activité et sa renommée s’étendant jusqu’en Chine et en Mongolie.
En 1247, le khan mongol Göden fait du supérieur du monastère le vice-roi du Tibet. Depuis, le chef spirituel de la secte a régné sur la région située à l'ouest de Shigatse.
L'actuel Sakya Trizin, détenteur du Trône des Sakya et sa 41e incarnation s'est exilé du Tibet en 1959 et réside aujourd'hui à Dehra Dun en Inde. Comme tous les chefs de lignée Sakya, il est marié. Il a deux fils et le plus jeune, Dungsey Gyana Vajra né le 5 juillet 1979 à Dehra Dun, est moine et dirige le monastère de Sakya construit en Inde.
Après cette visite, retour sur Shigatse afin de boucler nos valises. Le lendemain matin, départ en car pour rejoindre l'aéroport de Lhassa. La route qui suit le Brahmapoutre défile sous nos yeux, nous avons déjà pleins de souvenirs en tête et des regrets de quitter le Tibet et ses habitants.
Nous prendrons un premier vol intérieur et un deuxième international pour rejoindre Paris. J’aurai la chance d’être près d’un hublot, et le ciel étant bien dégagé, nous pourrons, une dernière fois, admirer les sommets himalayens.
Sachant ce que vit le peuple tibétain, ce voyage nous a particulièrement émus. De par leur ferveur religieuse et leur culture, on ne peut rester insensible à leur histoire qui s'inscrit dans un long combat fait de drames successifs depuis tant d'années.
Cela restera l'un de nos plus beaux voyages, d'autant plus que nous avons eu la chance de bénéficier d'un temps magnifique tout au long de notre séjour. Ce n'est pas facile de retranscrire avec des photos ce que nous avons ressenti, mais j'espère que ce carnet vous donnera, pour celles et ceux qui le souhaitent, l'envie d'aller voir des paysages époustouflants et un mode de vie si différent du nôtre.
Voyage raconté par icare
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